Dictionnaire du Moyen Français (1330-1500)

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     PERDRE     
FEW VIII perdere
PERDRE, verbe
[T-L : perdre ; GD : perdre ; GDC : perdre ; DÉCT : perdre ; FEW VIII, 221a : perdere ; TLF XIII, 58b, 69a : perdre/perdu]

I. -

Empl. trans.

A. -

Perdre qqc. [une chose abstr. ou concr.]

 

1.

"Ne plus avoir, en partie ou totalement, momentanément ou définitivement"

 

a)

[P. réf. à l'intégrité physique ou morale d'une pers.]

 

-

[La perte concerne la façon d'être] : Ou est ton orgueil maintenant, Ton boban, ton fier cueur et grant ? A quel gieu, en quel lieu et temps As perdu tes cointoiemens ? (GUILL. DIGULL., Pèler. âme S., c.1355-1358, 4070).

 

-

[La perte est d'ordre physique]

 

.

Perdre la vue. "Devenir aveugle" : Avugle sui, je n'i voi goute, Perdue j'ai ma veue toute. (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. St., c.1330-1331, 1480).

 

.

Perdre (la) vie. "Mourir" : Et encore ne croi je mie Que adonc je perde la vie. (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. St., c.1330-1331, 8284). "Expedient est et proufit Que pour touz un perde vie Et touz ne la perdent mie." (GUILL. DIGULL., Pèler. J.-C. S., 1358, 7445-7446).

 

b)

[P. réf. à la qualité d'une chose] : Pierres en furent fendues, Et toutes orbes les nues Pour le soulel qui oscurci Et toute sa clarte perdi. (GUILL. DIGULL., Pèler. J.-C. S., 1358, 9670).

 

2.

"Causer la perte de" : GRÂCE DE DIEU. Pieça le monde fust perdu, Se ne l'eüsse maintenu. (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. St., c.1330-1331, 325).

 

-

En partic. "Gâcher, gaspiller"

 

-

Perdre son temps : L'ÂME AU CORPS. Car tant com tu fus avec moi, Tresmale vie me menas Et me fëis perdre mains pas, Perdre mon temps et foloier Et par chemins tors forvoier. (GUILL. DIGULL., Pèler. âme S., c.1355-1358, 4079).

 

-

Perdre sa peine. V. peine

 

3.

Perdre sa voie. "Ne plus retrouver son chemin, s'égarer" : Quar par bos a on tost perdu Sa voie et mainz perilz y sont Aus pelerins qui seulz y vont. (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. St., c.1330-1331, 9034).

B. -

Perdre qqn

 

-

Au passif "S'écarter du chemin (ici du droit chemin) que l'on doit suivre et ne pouvoir le retrouver" : LE PÈLERIN À GRÂCE DIEU. À toi me tieng, à toi m'apui ; Se ne m'aïdes, perdu sui. (GUILL. DIGULL., Pèler. vie hum. St., c.1330-1331, 11394).

 

.

RELIG. Estre perdu. "Être damné" : DIEU À JÉSUS. "Tu vois que pour celle pomme [qu'Adam mangea] Grant amende me doit homme, Et vois qu'il faut qu'il soit perdu Pour tant quë il m'a offendu..." (GUILL. DIGULL., Pèler. âme S., c.1355-1358, 6191).

 

Rem. Cf. FEW VIII, 222b : « mfr. nfr. perdu "damné" MirND ».

II. -

Part. passé en empl. adj. "Mal employé ou employé sans profit, inutile" : Comment quë auz folz soit avis Que faire bien en cest päis Soit perdu, si com visiter Les malades et conforter (GUILL. DIGULL., Pèler. J.-C. S., 1358, 5745).
 

Pèlerinages de Guillaume de Digulleville Béatrice Stumpf


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